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Le scénario Gorz

- 22 janvier 2014

Par Olivier Fressard

Les deux ouvrages collectifs Sortir du capitalisme. Le scénario Gorz, et André Gorz en personne, publiés sous la direction d’Alain Caillé et de Christophe Fourel[1], offrent au public écologiste une occasion particulière de revenir sur ce penseur, qui, dès 1978, réunissait un ensemble de textes en un volume intitulé Écologie et politique[2].

Gorz a élaboré une œuvre à l’écart de l’université et du monde académique, à la fois marginale et reconnue par un important public de fidèles lecteurs. Des livres utiles, une thèse même, ont déjà paru, depuis sa disparition en 2007, sur son œuvre. Mais, aussi intéressants soient-ils, ils sont sans aucun doute encore loin d’avoir donné tout l’écho nécessaire à ses idées-mères et à ses intuitions centrales.

La meilleure façon de rendre hommage à l’œuvre d’un théoricien est de la traiter comme il aurait probablement souhaité que nous le fassions, en l’introduisant dans un dialogue critique et en la portant à la discussion publique, en la mettant à l’épreuve des faits et de l’évolution de la réalité effective et de l’analyse conceptuelle. C’est ce à quoi se prêtent précisément les auteurs des deux ouvrages publiés à la fin de l’année 2013. Dans leur préface, Alain Caillé et Christophe Fourel présentent les articles de l’ensemble des contributeurs qui, s’ils se reconnaissent une dette à l’égard de l’oeuvre de Gorz et manifestent de la gratitude, voire de l’admiration son égard, n’hésitent pas pour autant à exprimer des réserves, des critiques, voire, parfois, des désaccords de fond. 

Le premier volume, André Gorz en personne, réunit principalement des témoignages sur la trajectoire et la personnalité de l’auteur. Le volume intitulé Sortir du capitalisme. Le scénario Gorz, auquel nous nous attachons ici, reflète ses principales préoccupations et orientations théoriques.

Marx, interlocuteur principal de Gorz

Dans l’analyse critique de nos sociétés, Gorz s’est donné, au plan théorique comme dans son analyse empirique, un interlocuteur principal, Marx, auquel seront associés, par la suite, des marxistes contemporains, en particulier allemands ou italiens. Son rapport à ce courant de pensée n’a, pour autant, jamais été dogmatique. Il a toujours pris la forme d’un travail vivant qui l’a conduit loin de la pensée marxiste orthodoxe rigide et sclérosée, qui n’avait plus rien à nous dire sur la réalité de nos sociétés contemporaines.

Chez Gorz, le travail théorique s’effectue sans cesse de front avec une observation attentive de la réalité sociale concrète, de ses transformations et de ses frémissements qui lui a souvent permis d’anticiper sur ses évolutions.

La rencontre décisive avec Illich

À la source marxiste, il faut ajouter la rencontre, décisive, avec Ivan Illich, dont il suivit, dans les années 1970, les séminaires au centre mexicain de Cuernavaca. Jean-Pierre Dupuy[3] nous rappelle, ici, toute l’importance des thèses d’Illich pour la trajectoire de Gorz. C’est à partir d’Illich, qu’il procède en effet à une critique d’ensemble de la société industrielle avancée, qui ne se limite pas à l’économie, mais intègre tous les aspects de la société : de l’énergie à la médecine, et de l’école aux transports. Sous le signe du projet convivialiste d’Illich, Gorz effectue la connexion entre l’analyse marxiste des sociétés capitalistes et la critique écologiste de la démesure et des dysfonctionnements des sociétés industrielles. Ainsi est né, pour lui, le projet d’une écologie spécifiquement politique visant un nouveau modèle de civilisation.

GorzAdeux.jpg«Adieux au prolétariat»: une inflexion majeure

Le volume principal édité aujourd’hui choisit d’exposer la pensée de Gorz à partir de l’inflexion majeure qu’a constituée la publication, en 1980, de ses Adieux au prolétariat. Au-delà du socialisme. Cet ouvrage avait, à l’époque, fait forte impression et suscité des réserves de la part même de ses amis ou de ses fidèles lecteurs. Parmi eux, Patrick Petitjean s’en fait l’écho. Selon lui, Gorz qui n’a jamais été un marxiste orthodoxe, rompt alors de manière franche avec plusieurs des dogmes centraux du marxisme, mettant ainsi ses lecteurs devant une bifurcation: continuer à réviser le marxisme de l’intérieur pour accompagner les mutations de nos sociétés, ou bien en laisser là un pan central pour s’adapter à une métamorphose historique appelant un tout autre système d’analyse et d’appréciation. Rappelons, toutefois, que Gorz prend ainsi ses distances avec le marxisme bien après d’autres penseurs de la gauche radicale. En quête d’intuitions fécondes, il recourra pourtant encore largement aux analyses du travail et de la valeur des Grundrisse de Marx dans son dernier livre à part entière,  L’Immatériel (2003).

Ecologie politique et marxisme: quel compagnonnage?

En quoi l’écologie politique est-elle intéressée par ce compagnonnage avec Marx et certains courants contemporains de la pensée marxiste? L’écologie a-t-elle nécessairement partie liée avec le marxisme? Nullement.

L’écologie politique est trop diverse, et même hétérogène, pour se réclamer d’une origine unique. Et on peut tout à fait investir authentiquement l’écologie politique sans croiser jamais la problématique et les thèses marxistes. Il faudrait certes faire un jour l’histoire croisée du marxisme et de l’écologie politique. Au plan théorique d’abord, car certains n’ont pas hésité à promouvoir un Marx écologiste avant l’heure[4]. Au point de vue politique ensuite, puisque le parti des Verts, en France du moins, est né de la réunion d’une source naturaliste et d’une source gauchiste.

À la lecture de l’ouvrage ici recensé, on saisit la prégnance de l’héritage marxiste chez les lecteurs de Gorz, y compris chez ceux qui se réclament de l’écologie politique. La contribution d’Alain Lipietz, le rappelle à l’occasion d’une superbe citation de Marx sur ce que serait le travail humain non aliéné, comme celle de Jean-Marie Harribey sur la théorie de la valeur, qui propose par ailleurs, «une critique socio-écologique de l’économie capitaliste»[5].

L’influence déterminante d’Illich

Les analyses de Gorz ont, en réalité, toujours largement débordé la problématique critique du capitalisme mise en place par Marx. Au marxisme, s’ajoutent, pour lui, deux autres sources majeures d’inspiration.

L’une nous renvoie à la phénoménologie existentielle de Jean-Paul Sartre, à laquelle Gorz sera toujours fidèle comme en témoignent sa conception de l’aliénation du sujet et de la liberté individuelle d’une part, et  son interprétation des revendications écologistes en termes de monde vécu.

L’autre fait signe, avec Illich, comme nous l’avons vu plus haute, vers une critique globale des sociétés industrielles qui s’en prend à la source industrialiste exprimée par un Saint-Simon plutôt qu’à la source proprement capitaliste.

Dans la critique illichienne de l’industrialisme, des institutions sont mises en avant qui n’apparaissent pas dans les analyses marxistes traditionnelles. L’ensemble des activités sociales fondées sur des savoirs professionnalisés et sur des expertises bureaucratisées y sont pointées comme des réalités centrales de l’institution de nos sociétés. La critique de l’évolution historique de ces domaines d’activité donne lieu  à la formulation d’une alternative formulée en termes de convivialité.

Il s’agit d’une utopie qui mêle à la fois une réappréciation des traditions et savoir-faire populaires, des communautés humaines d’interconnaissance et une promotion d’outils à dimension humaine. Ces outils font appel aux possibilités des technologies modernes, mais visent la production d’objets singuliers répondant aux besoins et désirs personnels des individus d’une part, à un exercice du travail dont les fins et le sens demeurent toujours sous contrôle de l’individu d’autre part. Cet ensemble de traits s’oppose à la fois à la démesure de la techno-science moderne appliquée à l’industrie, à l’aliénation aux méga-machines et mégastructures. Gorz rejette ainsi une division croissante du travail qui conduit à une professionnalisation indue au détriment de la polyvalence des individus dans les sociétés préindustrielles.

Une approche plutôt traditionnelle de l’écologie politique

Sous l’influence d’Illich en particulier, Gorz devient écologiste, non pas à partir des connaissances de l’écologie scientifique, mais du point de vue des effets délétères de l’industrialisme et du productivisme sur un cadre de vie à échelle humaine, que ce soit l’environnement naturel ou l’environnement urbain.

Gorz est principalement préoccupé par l’aliénation des hommes par le système capitaliste, par la forme que celui-ci donne au travail social, par l’insignifiance des compensations que la société de consommation offre aux travailleurs et aux individus. Il est avant tout soucieux du sens et de la valeur que chacun peut conférer à son existence, préoccupé par la liberté et le pouvoir de chacun de donner une forme propre à sa vie, qui exprime sa singularité et sa subjectivité.

De ce fait, il n’adopte pas de point de vue macroscopique sur la nature, comme le font les écologues scientifiques et, désormais, les écologistes en général, qui étudient les effets de l’activité humaine sur les écosystèmes et sur la biosphère. Pour lui, la nature renvoie au monde vécu individuel et interindividuel tel qu’il peut être appréhendé par chacun de manière intuitive et spontanée. C’est sous cet aspect qu’il entend en faire une pierre de touche de son projet. Celui-ci s’inscrit donc pleinement dans la tradition humaniste, interrogée, dans ce volume, par Geneviève Azam, et mise en cause, depuis, certains représentants de l’éthique environnementale.

Gorz a donc, somme toute, une approche assez traditionnelle de l’écologie politique qui s’inscrit dans un ensemble critique plus vaste dont elle n’est qu’une partie ou qu’un aspect.

Travail autonome vs. travail hétéronome

Trois problématiques développées par Gorz restent d’une actualité brûlante et sont susceptibles de nous interroger encore longtemps.

La première réside dans son opposition, introduite dans Adieux au prolétariat, entre une sphère hétéronome et une sphère autonome du travail.

Prenant acte des limites historiques qui font obstacle à une réconciliation entière de la société avec elle-même, Gorz propose de distinguer entre deux grandes parties de la vie sociale, séparées dans l’espace et dans le temps. D’une part, la grande production industrielle de masse a l’avantage de nous offrir des bien standardisés produits à grande échelle et à bas coût, propres à nous fournir l’équipement de base de notre vie quotidienne. Dans cette sphère, le travail est nécessairement aliéné et exploité. Si cette sphère ne peut être éliminée, elle peut être cependant régulée et les conditions de travail peuvent y être améliorées. C’est la sphère du travail hétéronormé. Il convient de la maintenir, autant que faire se peut dans des limites étroites pour permettre à un travail autonome, extérieure à elle, de se développer et de s’étendre.

D’autre part, Gorz conçoit la sphère du travail autonome dans une perspective individualiste. Dans le travail autonome, l’individu renoue avec la part, irréductible, de sa subjectivité. Il s’y adonne à la production de soi comme sujet, là où le capitalisme le réifiait en le contraignant à se fondre dans des cadres sociaux abstraits imposés de l’extérieur.

Cette disposition à travailler de soi-même, par soi-même et pour soi-même se fonde toutefois sur la mise à disposition d’outils techniquement sophistiqués mais conviviaux, dans des ateliers collectifs locaux. Cette manière de concevoir l’autonomie s’enracine dans la crainte que le travailleur individuel reste enchaîné à un travail social, aliéné par essence, auquel il serait rivé sans échappatoire possible.

Gorz semble redouter plus que tout l’aliénation à la puissance impersonnelle d’un collectif anonyme aveugle au vécu individuel. On pense, ici, à ceux qui redoutent d’avoir à produire des biens ou des services qu’ils n’auraient pas l’idée d’acheter eux-mêmes sur le marché, attirant ainsi l’attention sur la coupure aliénante entre le producteur et le consommateur. On pense aussi à ceux qui se raidissent contre la perspective d’avoir à produire, pour gagner leur vie, des biens ou des services auxquels ils ne reconnaîtraient pas une valeur d’usage authentique, soit qu’il les juge insignifiants, soit qu’il les juge destructeurs ou délétères. On pense, enfin, au non-violent appelé à travailler dans une usine d’armement ou à l’écologiste contraint de travailler dans une centrale nucléaire, tentés de se soustraire au collectif.

Toutefois, comme le fait valoir ici justement Bernard Perret dans sa contribution, l’analyse gorzienne dépend ici d’une métaphysique du sujet humain aveugle au fait que l’individu lui-même est une institution sociale, qu’il n’y a pas d’individu autonome possible hors d’une société autonome par institution. N’y a-t-il pas, ici, transféré dans le domaine socio-économique, transporté dans le champ du travail, un lointain écho de la désespérante formule de Sartre selon lequel « l’Enfer c’est les autres » ?

GorzImmateriel.jpgLa société de la connaissance selon Gorz

Gorz explore une autre problématique cruciale dans L’Immatériel, celle d’une évolution de nos sociétés vers ce qu’on a commencé à nommer, au tournant du XXIème siècle, le « capitalisme cognitif » ou, dans une autre perspective, la « société de connaissance ». L’idée générale n’est en fait guère nouvelle puisque Gorz cite à ce propos Marx dans ses Grundrisse. Plus récemment, d’autres penseurs comme Habermas ont attiré l’attention sur ce trait dans les années 1960[6].

Selon Gorz, le principal facteur de production résiderait désormais dans la connaissance ou, plus précisément, dans les savoir-faire et dans « l’intelligence collective » qui ont cette propriété de ne pas se laisser mesurer, quantifier ou objectiver comme le travail manuel des prolétaires d’autrefois. Ces savoir-faire se soustrairaient, par nature, à la loi de la valeur et de l’échange marchand. Cette situation sans précédent dans l’histoire humaine devrait conduire  nos sociétés à une situation d’abondance et de gratuité.

Certes, les capitalistes s’efforcent aujourd’hui, autant qu’ils le peuvent, d’inventer les formes qui leur permettent de s’approprier, aux fins de leurs intérêts particuliers, ce qu’il convient d’appeler les communs (commons) qui, comme tels, sont indivisibles et ne peuvent, en conséquence, pas être matériellement répartis. Leurs méthodes consistent toutes, dans cette perspective, à barrer l’accès aux ressources naturelles, aux patrimoines collectifs et aux réalisations de l’intelligence collective. Toutefois, selon Gorz, la situation est globalement favorable au dépassement du capitalisme et des formes du travail et de la valeur qui lui étaient consubstantielles. Avec le capitalisme cognitif, il y aurait, aujourd’hui, une véritable opportunité de faire advenir ce que Marx et Engels avaient envisagé dans leur Programme de Gotha et d’Erfurt: une société socialiste d’abondance dont la règle, selon la célèbre formule, «de chacun selon ses possibilités, à chacun selon ses besoins». Dès lors, idéal d’une société permettant à chacun d’épanouir l’ensemble de ses facultés et de donner libre cours à sa créativité pourrait enfin se réaliser.

Sans chercher à clore un débat passionnant, nous sommes, ici, en droit de poser quelques questions. Le travail intellectuel s’inscrit-il moins dans le temps que le travail manuel? Tout ce qui se déploie dans le temps n’est-il pas, au moins dans une certaine mesure, sous un certain angle, susceptible d’être mesuré?

La manipulation des signes est-elle si différente, à ce point de vue, de la manipulation des choses, des matériaux, des outils et des machines? Par ailleurs, l’activité intellectuelle ne doit-elle pas, pour devenir publique, donc communicable et partageable, se traduire en langage écrit saisi manuellement sur le clavier d’ordinateur comme autrefois sur la tablette d’argile?

Gorz nous semble, ici, prisonnier, une fois encore, d’une métaphysique héritée de Sartre qui l’amène à penser l’intelligence soit comme une réalité intérieure, soit comme une réalité spirituelle collective, celle des réseaux sociaux qui manifestent une «intelligence collective» dont il ne précise pas le statut.

La fascination de Gorz pour la perspective d’une économie entièrement dématérialisée, en contraste radical avec la culture matérielle prédominante depuis les origines de l’humanité, ne renvoie-t-elle pas, finalement, à la dichotomie moderne du corps et de l’esprit, de la matière et de la conscience qu’il conviendrait de dépasser ?

Sur cette question fondamentale, on peut regretter que la discussion n’ait pas été étendue, dans l’ouvrage qui nous est soumis, aux analyses, par exemple, d’André Orléan qui propose une théorie conventionnaliste de la valeur sur la base d’une critique serrée aussi bien des théories marxistes que des théories néo-classiques de la valeur économique[7].

Le revenu universel inconditionnel de subsistance

La dernière problématique centrale de Gorz, est celle d’un revenu universel inconditionnel d’existence à laquelle il a, à travers le temps, apporté diverses contributions[8], et qui connaît aujourd’hui un certain regain de faveur, en particulier chez les écologistes. La revendication d’une allocation universelle a été portée, au tout début des années 1980, par un groupe d’intellectuels belges rassemblés dans le Collectif Charles Fourier. Philippe Van Parijs, qui donne ici une contribution à ce sujet, en est un éminent représentant. Considérant que les immenses progrès de la productivité du travail dans nos sociétés rendent ténu le lien entre travail productif et quantité de marchandises produites, ses promoteurs considèrent que les politiques de recherche du plein-emploi par la croissance doivent être abandonnées. Le temps serait venu de déconnecter la distribution des revenus de la contribution de chacun à la production sociale. Cette solution serait à la fois rationnelle au plan économique et impérative au plan éthique. La pression exercée sur les individus par une société globalement riche pour que chacun ait, au sens littéral, à gagner sa vie pour pouvoir survivre, serait désormais dénuée de justification et dépourvue de sens. Un revenu social garanti répondrait aussi à une autre exigence : permettre à chacun, libéré du souci de satisfaire ses besoins élémentaires, d’acquérir une marge de liberté face aux offres d’emplois sur le marché auxquelles il pourrait répondre pour obtenir un revenu complémentaire. S’appuyant sur ce nouveau droit, les individus seraient, en effet, en mesure de refuser des emplois pénibles ou par trop mal payés. On retrouve ici une inspiration anarchiste, celle de Proudhon, dont Marx se gaussait à tort, lorsqu’il envisageait une société de petits propriétaires garantissant l’indépendance de chacun à l’égard de l’Etat. On lira, avec attention, ici, les contributions de Robert Castel, Philippe Van Parijs et de Carlo Vercellone, qui, traitant de ce thème, se prononcent en des sens opposés et attestent de la vivacité des débats que cette proposition inspire.

La pensée sociale et économique – mais guère politique comme le fait justement remarquer, ici, Roger Sue – a conduit Gorz, selon la manière même dont il interprète sa trajectoire dans Le Traître[9], à investir les problèmes concrets du monde commun, plutôt que de leur tourner le dos en s’adonnant à une pensée philosophique abstraite menée dans le repli sur soi. Pourtant, il semble trop souvent être reconduit à des idées philosophiques qui tiennent plus à des nœuds de la pensée et du langage qu’à des problèmes réellement existants. Les considérations les plus théoriques restent néanmoins toujours marquées, chez Gorz, au coin d’une grande sensibilité. Elles sont encore au cœur de plusieurs de nos préoccupations les plus cruciales. Les penseurs de l’écologie politique, en particulier, pourront, à n’en pas douter, s’en saisir longtemps encore et auront toujours profit à se laisser travailler par ses méandres et ses lignes de force.

Olivier Fressard, directeur de la Fondation de l’Ecologie Politique

 


[1] Le Bord de l’eau, 2013

[2] Ecologie et politique, Editions du Seuil, 1978, (Points. Politique)

[3] Les contributeurs à l’ouvrage collectif sont mentionnés en italiques

[4] John Bellamy Foster, Marx écologiste, Ed. d’Amsterdam, 2011

[5] La Richesse, la valeur et l’inestimable, Les liens qui libèrent, 2013

[6] La technique et la science comme «idéologie», Gallimard, 1990

[7] L’Empire de la valeur: refonder l’économie, Seuil, 2011

[8] Dès 1987 dans le Bulletin du Mauss, n°23, consacré à ce qu’on appelait alors l’allocation universelle. L’article de Gorz s’intitule: «Allocation universelle: version de droite et version de gauche».

[9] Ed. du Seuil, 1958. Réédition: Gallimard, 2004, (Folio. Essais).

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