Accueil / Publications / Notes / La France du bien-être, l’urgence d’un État social-écologique

La France du bien-être, l’urgence d’un État social-écologique

- 24 mars 2022

L’urgence d’un État social-écologique libéré de la croissance

Par Éloi Laurent

INTRODUCTION :
NOUVELLE ÈRE, NOUVEAU SIÈCLE, NOUVELLE ÉCONOMIE ?

La présente note – qui actualise et prolonge une publication précédente, Penser l’État-providence post-croissant (juillet 2020) – s’inscrit dans un contexte historique qu’il importe pour commencer de tenter de préciser. Nous sommes entrés, en France comme ailleurs, dans une nouvelle ère géologique, théâtre de l’aventure humaine dont la particularité est d’avoir été dessinée par l’humanité elle-même. Mais le nom, la nature et la datation de cette nouvelle époque sont encore en débat. Le 21 mai 2019, les membres du groupe de travail sur l’Anthropocène de la Société internationale de stratigraphie sont tombés d’accord à une écrasante majorité (88%) sur deux propositions : « l’Anthropocène » est une nouvelle ère chronostratigraphique ; celle-ci commence au milieu du XXe siècle. Le choix de cette datation s’explique pour une partie des spécialistes appelés à trancher cette question par l’apparition entre les années 1940 et 1960 d’un « signal stratigraphique », le carbone 14, isotope radioactif dispersé à travers le monde par des détonations d’armes nucléaires de fabrication humaine. Ce choix coïncide en outre avec l’inflexion de nombreux indicateurs marqueurs de la « grande accélération » de la transformation de la Biosphère par les systèmes économiques4. Mais autant la datation paraît irréfutable (le milieu du XXe siècle), autant l’évènement choisi est peu significatif au vu des trois crises écologiques majeures qui s’accélèrent sans cesse depuis lors : dérèglement du climat, dégradation des écosystèmes, destruction de la biodiversité.

On peut donc vouloir inscrire cette note dans une autre perspective historique, dont la dénomination et la datation diffèrent : l’avènement du « PIBocène », l’ère de la croissance économique globale, qui s’ouvre le 1er juillet 1944 au moment de l’inauguration de la conférence de Bretton Woods (New Hamsphire, États-Unis). Si cet évènement est fondateur, c’est qu’il consacre le Produit intérieur brut (PIB) comme mesure du développement des nations, va conduire de ce fait à son adoption comme indicateur de référence par la totalité des pays de la planète jusqu’à aujourd’hui et ainsi induire les destructions environnementales sans précédent dont rendent effectivement compte les courbes de la grande accélération.

Sujets abordés :
Partager sur :